L’autonomie du patient confrontée au statut hybride de la personne de confiance

La loi du 28 décembre 2015 a introduit la possibilité de désigner une personne de confiance dans les structures sociales et médico-sociales


Cette mesure s’inscrit dans un contexte de longévité accrue avec le souci de préserver l’autonomie et la dignité des personnes. Pour autant, le statut hybride de la personne de confiance permet-il de garantir efficacement l’autonomie des patients ?

Les mesures incitatives à La désignation d’une personne de confiance
La désignation d’une personne de confiance doit permettre d’accompagner dans son parcours de soins une personne le plus souvent en situation de vulnérabilité en l’aidant dans sa prise de décision et en étant le référent de l’équipe médicale lorsque le patient ne peut plus faire porter sa voix. La personne de confiance en tant que relai entre le patient et l’équipe médicale joue un rôle primordial. Le législateur a donc souhaité favoriser sa désignation notamment au sein des EHPAD et a pour ce faire instaurer l’obligation pour le directeur d’établissement d’informer le résident quant à la possibilité dont il dispose de désigner une personne de confiance.
À ce titre, le décret n°2016-1395 du 18 octobre 2016 a renforcé les modalités de délivrance de l’information par la mise en place d’un formalisme. En effet, l’information doit être délivrée par le directeur de la structure médico-sociale, au moins huit jours avant l’entretien préalable à la conclusion du contrat de séjour ou préalablement à une hospitalisation. A cet égard, le représentant de l’établissement doit remettre une notice d’information contenant des renseignements sur le rôle de la personne de confiance, les modalités de sa désignation ainsi que celles de sa révocation. Par ailleurs, le résident doit être informé que la désignation d’une personne de confiance est un droit dont il dispose et non une obligation. En pratique, ce process apparaît respecté puisqu’en 2016, 83 % des EHPAD avaient recueilli le nom de la personne de confiance de leurs nouveaux résidents.
Dans ce sens également, la mention de la personne de confiance doit être précisée dans le dossier médical partagé du patient dont le déploiement par l’Assurance maladie sur l’ensemble du territoire a été annoncé par Madame la Ministre des solidarités et de la santé pour le mois d’octobre 2018.

Le rôLe de La personne de confiance Limité par son absence de pouvoir de représentation
La personne de confiance détient, outre sa mission d’accompagnement dans la prise de décision du patient, un rôle de « porte-parole » de ce dernier. Les professionnels de santé doivent par conséquent consulter la personne de confiance lorsque le patient est dans l’incapacité d’exprimer son consentement. Pour autant, la personne de confiance ne peut consulter le dossier médical du patient mais peut uniquement y accéder en présence du patient. Dans l’hypothèse où le patient a rédigé des directives anticipées – en 2016 28% des résidents d’EHPAD avaient adopté des directives anticipées -, il appartient à la personne de confiance de veiller à leur respect, elle ne peut toutefois les communiquer à l’entourage du patient.
Le rôle de la personne de confiance apparait cependant limité au regard du caractère purement consultatif de son avis et non représentatif du patient : la personne de confiance ne peut consentir en lieu et place du patient mais uniquement faire connaître les souhaits de ce dernier qui naturellement doivent être pris en compte par l’équipe médicale. Ce pouvoir limité est contrebalancé par le rôle de référent de la personne de confiance dont l’avis prime sur celui d’un proche ou d’un membre de la famille, son témoignage prévalant selon la règlementation « sur tout autre témoignage ». Le statut hybride ainsi conféré à la personne de confiance apparaît comme le corollaire du formalisme simplifié permettant la désignation comme la révocation de la personne de confiance.


Le mandat de protection future : une soLution aLternative à La personne de confiance ?
Le simple statut de « témoin » de la volonté du patient et l’absence de caractère obligatoire de l’avis donné par la personne de confiance interrogent quant à la possibilité pour le patient de recourir à un autre moyen d’assurer le respect de ses souhaits en matière médicale.
Le mandat de protection future a été introduit en 2007 et permet à toute personne majeure ne faisant pas l’objet d’une mesure de tutelle de charger une personne de la représenter dans le cas où elle ne pourrait plus faire valoir seule ses intérêts. Cette mesure apparait comme une alternative au mécanisme de la personne de confiance. En effet, à travers le mandat de protection future, le mandant donne un pouvoir de représentation à un mandataire pour la protection de ses biens et de sa personne permettant ainsi une véritable représentation dans la prise de décision médicale.
L’efficacité de cette mesure est toutefois limitée par plusieurs éléments. En premier lieu, le mandat de protection future ne peut être mis en place pour les majeurs sous tutelle. Or, depuis 2016 la faculté de désignation d’une personne de confiance est ouverte aux personnes sous tutelle. En second lieu, le formalisme du mandat de protection future est bien plus contraignant que celui de la personne de confiance. En effet, la désignation de la personne de confiance est révisable et révocable à tout moment quand le mandat de protection future ne peut, une fois mis en exécution, qu’être révoqué par un juge. Enfin, le mandat de protection future est limité à une durée de 5 ans, au-delà de laquelle il est nécessaire de le renouveler quand la désignation de la personne de confiance n’est pas limitée dans le temps.


En conclusion
Le vieillissement de la population rend cruciale la notion d’autonomie du patient. Le statut hybride de la personne de confiance et la rigidité du mandat de protection future montrent les limites et les difficultés à accompagner les patients dans leur prise de décision médicale. Revue Ehpadia 10/2018

 

Olivier Samyn et Ghislaine Issenhuth